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 Les exilés afghans dans le dédale de l'Europe

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Les exilés afghans dans le dédale de l'Europe Empty
MessageSujet: Les exilés afghans dans le dédale de l'Europe   Les exilés afghans dans le dédale de l'Europe Icon_minitimeLun 15 Juin - 8:25

Les exilés afghans dans le dédale de l'Europe (Carine Fouteau , mediapart )


voir sur le site d'Echanges & Partenariats le CR du travail de Lily
Boillet en GB http://emi-cfd.com/echanges-partenariats/spip.php?mot14

*****************

Mediapart.fr 4 juin 2009

Les exilés afghans dans le dédale de l'Europe

Par Carine Fouteau

Il est afghan et a parcouru la moitié du globe, de Kandahar à Paris, en
trois mois. Il voyait l'Europe comme une terre d'accueil, il s'y retrouve
piégé, momentanément tout du moins, sans logement fixe ni travail ni
famille. Abdullah Alizai a 22 ans. Il a l'air d'un jeune homme de cet âge,
basket, tee-shirts superposés, jean. Souriant, mais visiblement fatigué.
Il s'est senti menacé par les talibans au point de s'enfuir de chez lui.
Son père et son frère ont été assassinés, dit-il, entremêlant le français
et l'anglais pour raconter son histoire. Au printemps 2008, sa décision
est prise: il quitte sa mère, direction le Pakistan en bus, traverse à
pieds les cols enneigés de la frontière irano-turque, «nous marchions la
nuit pour ne pas nous faire repérer», et roule vers la Grèce caché dans
des camions.

Aux abords de l'UE, son récit devient flou, exprès. Abdullah Alizai
connaît les embûches de la législation européenne. Tout indice d'une
présence dans un pays autre que la France risque de compromettre la
demande d'asile qu'il a déposée à l'Office français de protection des
réfugiés et apatrides (Ofpra). Selon le règlement de Dublin II, il
pourrait être renvoyé en Grèce ou en Italie, par exemple, si ses
empreintes y étaient retrouvées dans le fichier Eurodac. Voilà six mois
qu'il attend une réponse, «je deviens fou», répète-t-il. «Je n'ai nulle
part où aller. J'ai dépensé 6.000 euros pour venir jusqu'ici, j'ai vu des
choses que je n'aurais pas dû voir, des gens horribles, des pauvres qui
couraient pour échapper à la police, je me suis cassé les poignets en
tombant, j'ai eu peur souvent. Maintenant, je n'ai plus rien. Je pense, je
pense, tout le temps, c'est tout.»


Demandes d'asile déposées par les Afghans en Europe. Réalisée par Thomas
Honoré, cette carte est issue de «Géographie critique des politiques
migratoires européennes», à paraître en septembre 2009 chez Armand Colin.
Le taux de reconnaissance du statut de réfugié est représenté par
l'intensité de la couleur à l'intérieur des cercles (du plus clair au plus
foncé: du pourcentage le moins élevé au plus élevé).

À peine arrivé à Paris en juillet 2008, Abdullah Alizai fonce vers Calais
dans l'espoir de traverser la Manche. Il n'a pas de contacts là-bas, mais
il parle couramment l'anglais. Lors de son parcours, il accumule des
informations sur les «meilleurs» trajets et destinations. À lui de faire
le tri entre les rumeurs, les idées reçues et les données recoupées et
stratégiques. À lui de gérer son argent, de faire son chemin entre les
passeurs véreux et les amis plus ou moins désintéressés, de repérer les
militants associatifs susceptibles de l'aider à trouver un endroit pour se
doucher, une couverture ou des chaussures de rechange. «À Calais, enfin,
dit-il, j'ai retrouvé beaucoup d'Afghans! J'ai pu discuté avec eux. Ça m'a
fait du bien.» Il remet à jour son stock d'informations: le prix du
passage (300 euros à ce moment-là – cela peut monter jusqu'à 800 lorsque
la présence policière est renforcée), les autres voies d'accès, comme
Dunkerque ou plus au nord sur les côtes belges, le chemin vers les pays
scandinaves, «plus risqué» par l'Allemagne, etc.


L'Angleterre, destination par défaut

Comme lui, ils sont des centaines de milliers d'Afghans, d'Irakiens et de
Somaliens, entre autres nationalités, à être entrés dans l'Union
européenne par la frontière gréco-turque: 150.000 personnes y auraient
transité«illégalement» par la voie maritime ou terrestre en 2008, selon le
ministère de l'intérieur grec.


Guide en anglais et farsi rédigé par un migrant distribué à Athènes.

Parmi les migrants, l'Angleterre continue d'avoir la cote, malgré le
durcissement de sa politique migratoire. Ce pays n'est pas vu comme un
eldorado, mais un lieu où il est possible de demander l'asile et de se
faire comprendre. «Là-bas, au moins, c'est clair, dit Abdullah Alizai.
Soit ils vous expulsent tout de suite, soit vous déposez l'asile, et là,
ils vous trouvent une place dans un ‘home'.» Après une mission de cinq
mois en Grande-Bretagne aux côtés d'exilés, Lily Boillet, présidente de
l'association Terre d'errance <http://terreerrance.wordpress.com/> dans
le Pas-de-Calais, confirme que ce pays, hors de l'espace Schengen mais
signataire du règlement de Dublin II, est doté d'un système de prise en
charge des demandeurs d'asile. D'abord placés dans des «hostels», les
candidats sont ensuite répartis dans toute l'Angleterre «dans des petites
maisons ouvrières».

«Une fois que la demande est estimée fondée, écrit-elle dans son mémoire
(voir sous l'onglet Prolonger), le demandeur d'asile est automatiquement
pris en charge le temps de la procédure. Je n'ai vu aucun demandeur
d'asile à la rue, contrairement à ce que j'ai pu observer en France.»
Mais, «si vos empreintes ne sont pas claires ou si on a trouvé trace de
votre passage ailleurs sur le sol européen, ou l'existence d'une
précédente demande d'asile, vous serez généralement envoyé en rétention le
soir même». Or la durée de rétention y est illimitée, le record étant de
huit ans. Il existe alors un système de libération sous caution, «on
bail», qui suppose que le migrant ait de solides soutiens sur place.

La Grèce et l'Italie font figure de repoussoir

La Grèce, où l'asile est un miroir aux alouettes, a mauvaise réputation:
le taux d'acception des demandes y est proche de zéro et le dépôt d'un
dossier ne donne droit à aucune aide. La police, surtout, fait peur. Les
témoignages de matraquage circulent entre les exilés. «Or, c'est elle qui
reçoit et traite les demandes d'asile», indique Sara Prestianni, membre du
réseau Migreurop <http://www.migreurop.org/> , spécialiste des conditions
de vie des migrants en Grèce et en Italie. «Les plus fortunés, dit-elle,
achètent pour 2.000 ou 3.000 euros un faux visa pour tenter de rejoindre
en avion une capitale européenne, les autres courent entre les roues des
camions à Patras. Un nouveau chemin, encore très minoritaire, est en train
de s'ouvrir en passant par la Macédoine, la Serbie et la Hongrie.»

À Patras, port de départ vers l'Italie, Afghans et Kurdes se retrouvent
dans un bidonville totalement insalubre (voir le reportage photo sous
l'onglet Prolonger). Ceux qui ont été refoulés depuis d'autres pays
européens reçoivent une «carte rouge» de demande d'asile, mais seuls les
femmes et les enfants ont une chance d'obtenir une place dans un centre
d'hébergement. Seul avantage de la Grèce: il est facile d'y trouver un
travail, au noir, dans les agrumes ou les oignons, ce qui permet
d'accumuler de quoi continuer le trajet. Signe que leur précarité ne les
empêche pas de s'organiser, un livret de 80 pages, titré Europe Way Guide,
rédigé par un migrant, est distribué dans les web bars d'Athènes, où Sara
Prestianni l'a trouvé. Cartes à l'appui, les trajets les plus «sûrs» y
sont décrits, les horaires de trains et de bateaux détaillés avec les
tarifs et des traductions d'expressions utiles dans la vie quotidienne
sont proposées du farsi à l'anglais (pour en consulter des extraits,
cliquez ici
<http://www.mediapart.fr/files/guideafghans.pdf> ).


Carte extraite de l'Europe Way Guide.


L'Italie aussi fait figure de repoussoir. Arrivés de Grèce par Bari,
Ancône ou Venise, les exilés risquent d'être renvoyés avant même d'avoir
pu demander l'asile. Les centres d'hébergement sont bondés si bien qu'il
est presque impossible d'obtenir une place. Les agressions racistes les
découragent un peu plus de rester. «J'ai rencontré une personne qui avait
été expulsée d'Angleterre vers Rome. Quatre jours plus tard, elle était de
nouveau à Douvres», indique Lily Boillet.

Course poursuite entre les policiers et les Afghans

Et la France? Dans plus de 50% des cas, les Afghans et les Irakiens
obtiennent l'asile. Mais «tout est fait pour qu'ils ne le sachent pas»,
indique Jean-Pierre Alaux, fondateur du Collectif de soutien des exilés du
Xe arrondissement de Paris <http://www.exiles10.org/> . «Les informations
sont si difficiles à trouver et les conditions de vie tellement
déplorables à Paris et dans le Calaisis, avec le harcèlement continu de la
police, qu'ils sont incités à continuer leur route vers l'Angleterre»,
ajoute-t-il.

Abdullah Alizai confirme: «Quand j'étais à Calais, une jeune femme m'a
expliqué que je ferais mieux de déposer une demande ici. J'ignorais que
c'était possible. Si je ne l'avais pas rencontrée, je serais peut-être
encore en train d'essayer de passer sous un camion.»


Extrait de l'introduction de l'Europe Way Guide.


Muni d'une pochette rouge rassemblant ses documents personnels, le jeune
Afghan décide rapidement de tenter sa chance en France. Peu après son
arrivée sur le territoire, il se fait arrêter par la police à la gare de
Lille. Vu sa nationalité, il est relâché car il n'est pas expulsable,
mais, comme il n'a pas encore déposé de demande d'asile, il est soumis à
la «procédure prioritaire», qui, malgré son nom, n'a pas pour effet
d'accélérer la réponse de l'administration mais de lui interdire l'accès à
un centre d'hébergement et à une allocation. «Les Afghans sont rarement
refoulés, indique Jean-Pierre Alaux, néanmoins, dès qu'ils voient de
nouvelles têtes, les policiers font tout pour les arrêter avant qu'ils ne
demandent l'asile pour qu'ils n'aient droit à rien.»

Comme des centaines d'Afghans, Abdullah Alizai vit sans ressources à
Paris. Il dort sous les portes cochères, puis trouve refuge au jardin
Villemin, entre le canal Saint-Martin et l'ancien couvent des Récollets
dans le Xe arrondissement. Pendant quelques mois, il loge chez un
agriculteur, près de Nevers dans la Nièvre. Mais, un jour qu'il est à
Paris en vue d'un entretien avec l'Ofpra, il est arrêté, près de la gare
de l'Est, par la police qui l'accuse d'être un passeur. Poursuivi au titre
de l'article L622-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, il
passe quatre nuits au Dépôt à la préfecture de police de Paris sur l'île
de la Cité. «Pendant dix jours, dit-il, j'ai aidé des personnes à recevoir
de l'argent sur un compte Western Union. Ça m'a rapporté quelques euros,
c'est tout, j'ai vite arrêté quand j'ai compris que c'était illégal.» La
police française a des objectifs d'arrestations de «passeurs» à atteindre
chaque année (5.000 en 2009), si bien que ses agents ne prennent pas
toujours le temps de distinguer les membres de mafias internationales des
«aidants» amateurs.

«La catégorie de passeur, qui n'existe – faut-il le rappeler? – que parce
qu'on ferme les frontières, englobe ceux qui opèrent dans des filières
structurées et mafieuses exploitant la misère humaine, les petits
criminels qui disparaissent après avoir soutiré des sommes exorbitantes,
ceux qui ferment les portes de camions pour pouvoir se payer à leur tour
le voyage, ou encore les coups de mains gratuits et solidaires – retrait
d'un mandat Western Union pour le compatriote qui n'a pas de papiers,
achat d'un billet de train pour celui à qui l'agent SNCF demande en toute
illégalité un document d'identité, etc.», notent Karen Akoka et Olivier
Clochard, membres de la Coordination française pour le droit d'asile
<http://cfda.rezo.net/> , dans un article de la revue Vacarme (n°48, été
2009). «Tous, ajoutent-ils, sont passibles de poursuites sur le fondement
de l'article L622. C'est le cas des Érythréens de Norrent-Fontes, qui,
pour échapper aux mafias régnant sur leur 'jungle', ont mis en place un
système fonctionnant sur le mode coopératif: certains sont désignés pour
fermer les portes du camion et rémunérés pour les risques qu'ils prennent,
selon un prix décidé collectivement pouvant varier avec le niveau de
pauvreté et allant jusqu'à la gratuité, en cas de grand dénuement.» Les
lieux parisiens traversés

Interdit de jardin Villemin en raison de la procédure engagée contre lui,
Abdullah Alizai continue à quadriller Paris. Il connaît les lignes de
métro par cœur. Ses points de repères sont les bureaux du Gisti, près de
la rue Popincourt dans le XIe arrondissement, le local de France terre
d'asile à La Chapelle, où il reçoit son courrier, le Camres, un centre
médicalisé, passage Dubail dans le Xe arrondissement, et le Kiosque, un
centre d'accueil géré par Emmaüs, rue du Faubourg-Saint-Martin. Il ne dort
plus à la rue, mais chez des amis, «des Afghans, qui ont connu la même vie
que moi, ils ne demandent rien, je les rembourserai plus tard».


Extrait d'expressions usuelles retranscrites dans l'Europe Way Guide.

D'autres lieux parisiens servent de halte incontournable dans l'errance
quotidienne des exilés: la permanence médicale de Médecins sans frontières
<http://www.msf-tv.com/video/?v=96789577930932361162009> , la Boulangerie,
un ancien local de l'armée transformé en centre d'hébergement, les soupes
populaires de l'Armée du salut et des Restos du cœur, les urgences de
Lariboisière et de Saint-Louis, en cas de gale, mais aussi la bibliothèque
du centre Pompidou, pour l'accès à internet et aux méthodes de langue.

«Les pouvoirs publics et les médias, regrette Jean-Pierre Alaux, les
présentent comme des personnes manipulées par les mafias, incultes et
désespérées. C'est vrai qu'ils vivent dans des conditions très dures. Ils
se font parfois escroquer. Certains sont obligés de se prostituer. Mais la
réalité est plus complexe. Ce sont aussi des gens modernes, ils chattent,
ils ont des téléphones portables et des adresses électroniques. Ils sont
le plus souvent débrouillards et inventifs, ils s'auto-organisent,
certains profitent de leur passage à Paris pour aller visiter la tour
Eiffel ou La Défense, d'autres deviennent des experts en droit des
étrangers.»

Abdullah Alizai a perdu sa pochette rouge. Il vient de reconstituer son
dossier. Il rêve d'un lit et d'un travail. Sa famille lui manque. Tous les
jours, il vérifie son courrier, en attente de la réponse de l'Ofpra. Pour
l'instant, il a du mal à penser à autre chose.


URL source:
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[3]
http://www.mediapart.fr/journal/france/270109/besson-veut-rendre-le-calaisis-etanche-aux-exiles
[4]
http://www.mediapart.fr/journal/france/171108/paris-renonce-a-l-expulsion-d-afghans
[5] http://terreerrance.wordpress.com/
[6] http://www.migreurop.org/
[7] http://www.mediapart.fr/files/guideafghans.pdf
[8] http://www.exiles10.org/
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[10] http://www.msf-tv.com/video/?v=96789577930932361162009
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