Arles-Avignon en Ligue 1 : un danger pour la mairie ? Comment un petit club de foot qui s’entraîne
dans une ville et joue dans l’autre se propulse-t-il en cinq ans de CFA2
(amateurs) à la Ligue 1 ? A-t-il un espoir de survivre dans la cour des
grands ? Où va-t-on trouver l’argent pour mettre le stade aux normes ?
L’équipe de la mairie d’Arles, qui mise d’ordinaire plus sur la culture
que sur le sport, est-elle en danger ? Le monde impitoyablement
affairiste de la Ligue 1 ne fera-t-il qu’une bouchée des petits gars de
l’Athlétic Club Arles-Avignon ?
Cette avalanche de questions, comme autant d’attaques dans la
surface de réparation, n’est pourtant que la face émergée du
buzz qui agite l’ouest de la Provence depuis la victoire,
le 14 mai, de l’ACA devant Clermont et sa troisième position au
classement de la ligue 2, sésame pour la montée la saison prochaine.
Deux ans jour pour jour après l’annonce officielle de la découverte du
buste de Jules César dans les eaux arlésiennes, la ville joue à nouveau
au chef. A cette différence qu’il ne s’agit plus de culture mais de
football professionnel.
Il vient de loin, le petit club qui s’entraîne à Arles mais joue à
domicile au Parc des Sports d’Avignon. Encore dans le Championnat de
France Amateur 2 il y a cinq ans, l’ACA passe en première après une
saison éclair en ligue 2. Tout va très vite, à tel point que les
joueurs, en début de saison, lavaient leurs maillots à la maison et le
salaire moyen, de 5900 euros, était dérisoire relativement aux tarifs
pratiqués. Le budget annoncé pour la prochaine saison n’atteint pas 18
millions d’euros (dont 12 millions de droits télévisuels), ce qui
correspond grosso modo à trois contrats de joueur à Barcelone. Un des
plus modestes budgets européens.
Et avec ça, il faudra tout faire ? Pas dit, parce que là aussi ça bouge
vite et on pourrait voir arriver des investisseurs privés. En attendant,
l’urgence est de disposer d’un stade aux normes et ce n’est pas le cas
en Avignon. Combien peut coûter un tel chantier, des tribunes (il manque
au moins 10000 places), des vestiaires à la hauteur, une thalasso,
etc ? C’est la question à mille boules. Il faudrait peut-être voir du
côté d’Istres, qui a construit le sien en quelques mois. Du côté de la
mairie d’Arles, on est partagés entre l’euphorie affichée le jour de la
victoire et les réalités économiques et politiques : on n’a jamais
vraiment investi dans les infrastructures sportives, Arles c’est plutôt
la culture. Le problème est de taille et une attaque ciblée pourrait
déstabiliser le maire Hervé Schiavetti. Un groupe Facebook s’est créé,
relayé par le site officiel du club,
pour réclamer "un stade à Arles pour les Arlésiens". Quant à
l’autoritaire maire UMPiste d’Avignon, Marie-José Roig, elle a déclaré
assumer pleinement et vouloir trouver l’argent. Avec un sourire crispé :
en Avignon, non plus, on ne sait pas trop quoi faire de cette ascension
fulgurante. Et si le club ne se maintenait pas en Ligue 1, comment
justifier l’investissement ? Et s’il se maintenait, comment ensuite se
débarrasser des Arlésiens ?
D’ailleurs, l’ACA a-t-il l’ombre d’une chance de tenir tête à, par
exemple, son grand voisin marseillais ? On imagine l’ambiance dans les
Bouches-du-Rhône les soirs de derby… Certains commentateurs sportifs
attribuent la montée météoritique à la personnalité de l’entraîneur
Michel Estevan, homme de cœur surnommé "le magicien" par les joueurs. Un
réaliste ? Sans doute un homme qui sait motiver et apporter le génie
sur le terrain, surtout à domicile. Son équipe de Ligue 1 n’aura
certainement pas le même visage que l’équipe de la victoire, le grand
marchandage des joueurs (achats, ventes et prêts tant il est vrai que le
joueur est une marchandise interchangeable) passant par les vestiaires.
Et avec lui toutes les joyeusetés du foot-spectacle : marketing,
publicité, supporteurs déchaînés, feu médiatique… Deux autres hommes
peuvent peser dans cette balance, Alain Bompard l’adjoint aux sports de
la Ville d’Avignon et Jean-Marc Conrad, président de la Société Anonyme
Sportive Professionnelle SASP AC Arles-Avignon. On dit ces deux-là à la
hauteur de la situation… financière et technique. Bompard fut président
de Saint-Etienne et Conrad est le véritable gestionnaire du club, celui
qui a obtenu,
avec ambition, que les "Lions" arlésiens jouent dans le stade
avignonnais. Cela suffit-il pour assurer au club, comme le note un
internaute sur le site de l’Équipe "des joueurs solidaires un projet de
club et une équipe dirigeante qui est là pour le foot et prête à
investir et peut-être à perte" ?