Nombre de messages : 9406 Date d'inscription : 10/06/2007
Sujet: Pourquoi mon taux de visite baisse ... Jeu 22 Sep - 1:02
Psycho canine et idées reçues : le chien, cet éternel incompris
Les clébards sont mal connus par l'homme. Ce triste constat est la conclusion des travaux menés par l'anthrozoologue John Bradshaw, de l'université de Bristol, dans son ouvrage « In defence of dogs : why dogs need our understanding » (« Pourquoi les chiens ont besoin que nous les comprenions »).
Pourquoi donc s'entêter à comprendre les chiens alors que les hommes peinent déjà à s'entendre entre eux ?
Pour les non-propriétaires de chiens, sceptiques quant à l'intérêt fondamental des clébards, le sujet n'en est pas un.
L'anthrozoologie
L'anthrozoologie est la science des interactions entre humains et animaux. Elle se décline en plusieurs disciplines : ► la manière dont les hommes perçoivent et comprennent les animaux ; ► l'évolution des animaux sauvages en animaux de compagnie par le biais de la domestication ; ► les liens affectifs entre les animaux et les hommes ; ► les interactions des animaux en captivité.
Cette science a découvert par exemple que les porcs se reconnaissaient dans le miroir, comme les hommes.
Les vocations d'anthropozoologues, si rares soient-elles, ne trouveront pas satisfaction en France. Le domaine d'études n'y est pas couvert par l'enseignement universitaire.
Il faudra donc migrer chez les voisins germaniques ou anglo-saxons pour se former à cette science.
En plus de supporter leur museau dégoulinant dans le creux de nos mains parce que leurs maîtres sont des potes ; en plus de les freiner tant bien que mal lorsque, en chaleur, ils assaillissent les cuisses charnues de notre copine sur la plage ; on devrait donc faire preuve de psychologie ?
En tout cas, les anthrozoologues comme John Bradshaw y consacrent leur vie, que ça nous plaise, ou non.
Tristes chiens pour cause d'idées reçues
Le sens populaire croit que le chien, lointain cousin du loup, est un animal de meute. Il serait mû par des pulsions de domination et de hiérarchie tant parmi ses pairs que vis-à-vis de son maître. Les rapports d'autorité sont donc à la base de l'élevage canin. Si le maître ne se positionne pas d'emblée comme dominateur, son chien risque de l'envoyer sur les roses et de semer terreur dans la maisonnée.
John Bradshaw s'oppose vigoureusement à cette idée reçue :
<blockquote> « L'idée la plus répandue, et la plus pernicieuse, qui sous-tend les méthodes de dressage est que le chien cherche constamment à établir une hiérarchie de domination, où qu'il se trouve. »
</blockquote> Cette « mécompréhension » originelle rend tristes de nombreux chiens, prétend Bradshaw. Car elle régit le modèle d'interaction et d'élevage qui prévaut dans nos sociétés. Les directives avec lesquelles nous assommons nos chiens tendraient uniquement à les isoler de nous et à brimer leur instinct de jeu et de chasse.
Alors, que ne faut-il pas faire ?
En gros, il faudrait éviter tout ce qu'un site web de dressage de chien vous enseigne. Bradshaw est catégorique sur certains points :
en finir avec l'ordre de distribution des gamelles. En soi, si le chien a faim avant le chat ou avant le gamin, laissez-le manger ;
laisser le chien se coucher sur votre lit ou sur le sofa, comme s'il était l'un d'entre vous (sous-entendu, puisqu'il est l'un d'entre vous) ;
ne pas éviter de le regarder dans les yeux, par crainte de provoquer son instinct dominant.
Le chien, selon Bradshaw, n'est pas non plus une peluche altruiste et bien intentionnée. Ses comportements seraient circonstanciels. Un chien rassasié ne sautera pas sur l'os d'un de ses congénères systématiquement. Il le fera, en revanche, s'il a faim. Il est un être opportuniste ; il aime donner du plaisir et en recevoir, comme un homme. C'est d'ailleurs pour cela qu'il a été sélectionné pour devenir notre compagnon.
L'homme qui conseille de prendre son chien pour un cheval
L'avis de Bradshaw ne fait pas l'unanimité. Cesar Millan, un enragé de psychologie canine, fait un tabac aux Etats-Unis et au Canada avec sa série TV « Dog Whisperer » (en français : celui qui murmurait à l'oreille des chiens), diffusée sur National Geographic. Le Mexicain d'origine y livre à son public les secrets d'une relation harmonieuse avec les chiens. (Voir la vidéo en anglais)
Ceux-ci sont avant tout considérés comme des animaux de meute. Pas d'ami ni d'égal parmi les chiens. Dès lors, de deux choses l'une :
soit ils sont chefs de meute – ce qui est indésirable ;
soit – et c'est préférable – ils sont soumis.
Conformément à l'enseignement de Cesar Millan, le maître doit en toutes circonstances demeurer calme, en bon chef de meute. Une attitude sereine est la condition sine qua non au maintien de la position dominante vis-à-vis de la bête.
Aussi, les personnes éprises de leur chien n'exhiberont pas leurs sentiments au risque de se laisser dominer. A ce propos, le « dog whisperer » conseille même aux maîtres amoureux d'imaginer un cheval à la place de leur chien pour sortir de ce rapport affectueux.
Le chien urbain, presque plus un chien
Au-delà de la polémique, une chose est sûre : en ville, le chien serait complètement amputé de son instinct. Apparemment, aucune race ne porte en elle la disposition à la solitude. Pourtant, le chien urbain passe la majeure partie de sa vie à se traîner dans le salon en attendant le retour de son maître.
Même domestiqué, le molosse n'existe que pour jouer et pour chercher sa nourriture, se salir les pattes et le museau, renifler et fouiller. Certes, il existe bien les parcs à chiens dans chaque ville, mais ils en ont vite fait le tour.
Selon Cynthia Edelman-Rota, « coach canin » citée par quotidien suisse Le Temps :
<blockquote>« 90% des problèmes rencontrés avec des chiens dits agressifs ou capricieux, qui vocalisent, urinent ou détruisent, viennent du fait qu'ils ne supportent pas la vie que nous leur imposons. Et, au lieu de régler les problèmes, on leur donne des médicaments ! »
</blockquote> Objets de consommation, faire-valoir dégénérés
Cynthia Edelman-Rota dénonce « l'objetisation » du chien. Il ne serait qu'un faire-valoir pour beaucoup de maîtres dans notre société de consommation désabusée. Au paroxysme de cette tendance, les éleveurs de chiens de race feignent d'ignorer les tares dont souffrent leurs bêtes, manipulées à outrance. Pourvu qu'elles leur rapportent des trophées, qu'importent les maladies respiratoires ou les malformations cardiaques…
En 2008, la BBC défrayait la chronique en diffusant le documentaire « Pedigree Dogs Exposed ». Sous forme d'enquête, le film dénonce les pratiques malsaines autorisées dans le cadre de concours de beauté canine comme le notable Crufts, la plus grande exposition canine au monde organisée annuellement à Birmingham.